Tangerest situĂ©e sur la cĂŽte nord du Maroc. Elle est plus prĂ©cisĂ©ment implantĂ©e dans le dĂ©troit de Gibraltar, qui s’étend de Ceuta Ă  Tanger. La ville est donc baignĂ©e par la mer MĂ©diterranĂ©e, mais l’ocĂ©an Atlantique n’est pas loin. Pour explorer les grottes d’Hercules, il vous faudra d’ailleurs prendre plein ouest. Navires au mouillage face Ă  l’enclave britannique de Gibraltar Nora MareĂŻ, juillet 2010. 1Depuis toujours, le dĂ©troit de Gibraltar est un espace observĂ© et convoitĂ©, dont les fonctions ont Ă©voluĂ© Ă  chaque Ă©poque de l’histoire. L’ouverture du canal de Suez, en 1869, a cependant accĂ©lĂ©rĂ© son destin. Il devient le goulet majeur des routes maritimes en provenance d’Asie. La grande route impĂ©riale des Indes, celle du pĂ©trole arabo-persique, ou encore celle des produits manufacturĂ©s asiatiques passent systĂ©matiquement par Suez et donc Gibraltar pour les Ă©changes entre l’Europe et l’Asie Charlier, 1990 ; Guillaume, 1999 ; Marcadon, 2004. Il n’est alors pas nouveau de parler de mondialisation en ce qui concerne le dĂ©troit de Gibraltar. Toutefois, son rĂŽle Ă©volue rapidement depuis la fin des annĂ©es 1980. Il a ainsi Ă©tĂ© placĂ© sur l’échiquier maritimo-portuaire contemporain par l’amateur danois Maersk. Ce dernier, Ă  l’origine de changements structuraux dans les logiques du transport maritime conteneurisĂ©, a choisi comme port pivot Ă  l’échelle mondiale le port d’Algeciras sur le dĂ©troit de Gibraltar. Il place ainsi le dĂ©troit au cƓur des restructurations du transport maritime mondial et en fait un observatoire des changements VigariĂ©, 1995 ; Guillaume, 2005 ; FrĂ©mont, 2007. 2MalgrĂ© ce rĂŽle grandissant sur la scĂšne maritime mondiale, les rĂ©gions frontaliĂšres du dĂ©troit de Gibraltar, l’Andalousie d’un cĂŽtĂ©, le TangĂ©rois de l’autre, sont des rĂ©gions pauvres et Ă  la pĂ©riphĂ©rie des centres Ă©conomiques de leur pays respectif. Par l’émergence d’une dynamique portuaire conquĂ©rante, elles ont pourtant rĂ©ussi Ă  s’accrocher aux flux mondiaux passant quotidiennement Ă  leurs pieds. Dans quelle mesure, cet arrimage aux grands flux maritimes circumterrestres influence-t-il le dĂ©veloppement des territoires de rivage ? 3En proposant un regard global sur cet espace terraquĂ©, l’objectif de l’article est d’analyser les enjeux territoriaux d’un espace qui semble plus animĂ© par la mer qui se trouve en son centre que par ses rivages. La premiĂšre partie Ă©voque la maniĂšre dont ce passage maritime international est devenu une plaque tournante de la mondialisation des Ă©changes. Ensuite, un retour Ă  une Ă©chelle plus locale permet de rĂ©vĂ©ler les risques de ruptures spatiales engendrĂ©s par cet arrimage mondial. Enfin, dans une rĂ©flexion sur les solutions Ă  apporter Ă  cette dĂ©sarticulation entre un systĂšme mondialisĂ© et des marges qui peinent Ă  en profiter, la perspective d’une gestion commune des rives du dĂ©troit est envisagĂ©e. Illustration 1 - Localisation des ports du dĂ©troit et des activitĂ©s pĂ©ri-portuaires Source Nora MareĂŻ, 2008. Le dĂ©troit de Gibraltar, une plaque tournante pour la mondialisation des Ă©changes 4Sans ĂȘtre Ă  la tĂȘte d'une zone de production internationale ou de consommation de masse, il est rare qu’un espace maritime devienne un lieu d’escale pour les grands navires de la flotte mondiale. Pourtant sur le dĂ©troit de Gibraltar, la spĂ©cialisation dans le stockage et la redistribution des conteneurs Ă  l’échelle internationale, associĂ©e Ă  une forte activitĂ© de ravitaillement des navires, ne sont pas loin d’en faire une aire d’arrĂȘt incontournable sur la grande autoroute maritime Est-Ouest. Le dĂ©troit de Gibraltar devient un espace original oĂč se croisent le dense trafic marchand alimentant les Ă©changes entre Europe et Asie, et une circulation humaine de plus en plus intense, rĂ©vĂ©latrice des liens historiques entre l’Europe et l’Afrique. L’ensemble de ces flux hisse le dĂ©troit de Gibraltar au rang des dĂ©troits du Pas de Calais ou de Malacca en termes de trafic maritime international 97 000 Ă  100 000 navires par an et la nature de ces flux en fait un espace observatoire de la mondialisation des Ă©changes. Une plate-forme multisite d’éclatement des conteneurs 5En Ă  peine dix ans, la situation monopolistique du port d’Algeciras pour les trafics conteneurisĂ©s a Ă©tĂ© bouleversĂ©e par l’arrivĂ©e d’un concurrent de poids sur l’autre rive, le port marocain de Tanger-Med, et par une situation de saturation des infrastructures du port andalou. 1 L’ensemble des trafics portuaires sont donnĂ©es par les autoritĂ©s portuaires. Il existe des chiffre ... 6Sous l’impulsion du gĂ©nĂ©ral Franco et de sa politique de dĂ©veloppement de pĂŽles industriels en 1965, le petit port d’Algeciras devient un port d’intĂ©rĂȘt national. La localisation de ce nouveau pĂŽle industriel est Ă©vidente, face Ă  Gibraltar, le gouvernement franquiste Ă©tale raffineries, sidĂ©rurgies et centrales Ă©lectriques. Le fond de la baie d’Algeciras devient une vĂ©ritable zone industrialo-portuaire ZIP dont les effets se font sentir encore aujourd’hui puisque une part importante des trafics du port est Ă  imputer aux vracs liquides 39 % et aux vracs secs 5 %. Pourtant, ce ne sont pas les effets de cette industrialisation lourde qui sont les plus Ă©tonnants. Les dĂ©cisions prises durant les deux dĂ©cennies suivantes vont bouleverser le sort du port espagnol. En effet, l’arrivĂ©e de l’armement Sealand en 1975, puis de Maersk en 1986, vont faire d’Algeciras l’un des premiers ports europĂ©ens de la conteneurisation. DĂšs lors, le trafic conteneur ne cesse de croĂźtre et le port d’Algeciras, dotĂ© en services et infrastructures spĂ©cialisĂ©es apportĂ©s par les opĂ©rateurs, s’impose en Espagne, en Europe et en MĂ©diterranĂ©e. ExprimĂ© en nombre de conteneurs Ă©quivalent vingt pieds EVP, son trafic le situe au cinquiĂšme rang europĂ©en en 2007 prĂšs de 3,3 millions d’EVP ; il talonne, parfois surpasse, Gioia Tauro Ă  la tĂȘte des trafics mĂ©diterranĂ©ens ; et se hisse au premier rang espagnol devant Valence 2,4 millions d’EVP et Barcelone prĂšs de 2,1 millions d’EVP1. Ce dĂ©veloppement portuaire est visible par des extensions spectaculaires de terminaux avançant dans la baie le terminal Juan Carlos I 69 ha dĂ©diĂ© Ă  Maersk ; et les extensions de Isla Verde Exterior 121 ha, dont les premiers quais ont ouvert durant l’étĂ© 2010, et qui ont vu l’arrivĂ©e de l’armement corĂ©en Hanjin. MalgrĂ© cet imposant dĂ©ploiement, le port est proche de la saturation. 7Presque quarante ans plus tard, un scĂ©nario semblable se produit sur l’autre rive du dĂ©troit. Le Roi du Maroc annonce Ă  l’occasion du discours du trĂŽne, le 30 juillet 2002, le lancement d’une opĂ©ration d’amĂ©nagement d’envergure Ă  40 km Ă  l’est de Tanger. Il s’agit de construire ex nihilo un port en eau profonde, structurĂ© principalement autour de terminaux Ă  conteneurs. Chacun de ces terminaux a trouvĂ© rapidement son concessionnaire, de sorte que les travaux de la premiĂšre phase, dĂ©marrĂ©s en 2003, ont permis de faire tourner les deux premiers terminaux en 2007. L’opĂ©rateur Maersk, Ă  travers sa filiale APM Terminals y a vu une aubaine afin de consolider sa position sur le dĂ©troit. Au regard des 2 millions d’EVP enregistrĂ©s en 2010, l’initiative semble couronnĂ©e de succĂšs. Une zone stratĂ©gique pour le premier opĂ©rateur mondial 8Tanger-Med et Algeciras sont des ports similaires, Ă  classer dans la catĂ©gorie des hubs c'est-Ă -dire des plates-formes d’accueil et de redistribution des conteneurs Ă  une Ă©chelle qui peut ĂȘtre rĂ©gionale ou internationale. Ils sont caractĂ©risĂ©s par un taux de transbordement extrĂȘmement Ă©levĂ© plus de 85 % pour le port d’Algeciras et prĂšs de 96 % pour le port de Tanger-Med. Ce taux Ă©voque en quelque sorte le trafic perdu pour l’arriĂšre-pays et permet de les dĂ©crire comme de simples lieux de triage des boĂźtes » afin de les transfĂ©rer d’une ligne Ă  l’autre. Pourtant, cette fonction les place au cƓur des rĂ©seaux maritimes des plus grands opĂ©rateurs mondiaux. Illustration 2 - RĂ©seau secondaire lignes feeders de l’armateur Maersk en MĂ©diterranĂ©e au dĂ©part de ses trois hubs janvier, 2011 Source Services feeders ; rĂ©alisation N. MareĂŻ, 2011. 9Les stratĂ©gies de Maersk en MĂ©diterranĂ©e sont rĂ©vĂ©latrices de l’importance d’un hub dans le rĂ©seau maritime d’un transporteur conteneurisĂ©. Le premier opĂ©rateur mondial a incontestablement un avantage en MĂ©diterranĂ©e par un investissement sur trois passages maritimes le binĂŽme Algeciras/Tanger-Med sur le dĂ©troit de Gibraltar, Gioia Tauro sur le dĂ©troit de Messine et Port-SaĂŻd sur le canal de Suez. Ce systĂšme permet une couverture complĂšte de la zone mĂ©diterranĂ©enne grĂące Ă  la mise en place d’un systĂšme en hub and spokes. En effet, les hubs sont placĂ©s au plus prĂšs de la grande route maritime Est-Ouest, la localisation sur les passages internationaux est alors idĂ©ale. A partir d’un hub la multiplication des liaisons en arborescences feeders permet de multiplier les destinations finales illustration 2. Cette logique rĂ©ticulaire permet aux porte-conteneurs gĂ©ants d’éviter de dĂ©vier de l’axe Est-Ouest et donc d’effectuer des rotations plus importantes sur cet axe, tout en augmentant la zone de desserte grĂące au rĂ©seau secondaire. Cette pratique du hub and spokes, lĂ©gitimĂ©epar les Ă©conomies d’échelle qu’elle permet et les succĂšs d’opĂ©rateur comme Maersk, marque un changement d’époque dans le processus de restructuration du transport maritime mondial et dans la fonction portuaire. Ces activitĂ©s deviennent de plus en plus enchaĂźnĂ©es aux logiques de la logistique internationale Ducruet, 2005 ; FrĂ©mont, 1996. Une station de service de la mondialisation 10Aux croisĂ©es des routes maritimes internationales, le dĂ©troit de Gibraltar est devenu la premiĂšre zone mĂ©diterranĂ©enne pour l’approvisionnement des navires en fuel IFO, gas-oil MGO et huile marine MDO. D’une maniĂšre gĂ©nĂ©rale, de nombreux ports proposent ce genre de services, mais le soutage ou bunkering Ă  gros volumes n’est possible que dans une poignĂ©e de zones prĂ©sentant une situation gĂ©ographique Ă  proximitĂ© des grandes routes maritimes, des installations nĂ©cessaires d’accueil des navires et des services complĂ©mentaires comme la rĂ©paration navale et l’approvisionnement en eaux et en vivres Castillo Manzano, 2001. 2 Isemar / Le Marin, 6-06-08. 11Les ports du dĂ©troit ont livrĂ© 7,96 Mt de soutes en 2007 4,3 par Gibraltar ; 3,1 par Algeciras dont la moitiĂ© est destinĂ©e aux navires de Maersk qui frĂ©quentent le terminal Juan Carlos I ; 560 000 t par Ceuta ; et les capacitĂ©s de soutage de Tanger-Med sont Ă  venir. Ces chiffes restent modestes comparĂ©s aux grandes stations de soutage que sont Singapour 32 Mt en 2007, Fujairah dans le golfe Persique 16 Mt ou Rotterdam 13,6 Mt2, mĂȘme si l’activitĂ© a connu un essor considĂ©rable puisqu’en 1990 seulement 800 000 tonnes de soutes Ă©taient livrĂ©es par les ports du dĂ©troit. L’activitĂ© est favorisĂ©e par la possibilitĂ© de soutage sans contraintes de tirant d’eau et les opĂ©rations peuvent ĂȘtre rĂ©alisĂ©es Ă  quai ou en mer par une flotte locale de petits tankers. Le bunkering est nĂ©anmoins extrĂȘmement dĂ©criĂ© par les associations de protection de l’environnement au nom des risques qu’il engendre pour l’environnement cĂŽtier et marin du dĂ©troit. Un lieu incontournable de la traversĂ©e Europe-Afrique 3 A titre indicatif, 13 millions de passagers ont traversĂ© le dĂ©troit du Pas de Calais en 2010 dove ... 12L’intense flux marchand de l’artĂšre maritime Est-Ouest est entrecoupĂ© par un trafic Nord-Sud qui n’a cessĂ© de prendre de l’ampleur au cours du XXe s. Il s’agit d’une part, d’un courant marchand support d’une partie du commerce extĂ©rieur marocain avec l’Europe et d’autre part, d’un flux humain de plus de 5 millions de passagers dont 40 % traversent le dĂ©troit lors de la pĂ©riode estivale3 illustration 3. Les protagonistes de ce grand va-et-vient saisonnier sont en majoritĂ© des marocains vivants en Europe qui vont tels des fourmis », les galeries et remorques de voiture chargĂ©es Ă  ras bord, passer un moment dans leur pays d’origine Tarrius, 1992, Arab, 2009. 13Au dĂ©part de SĂšte en France, de GĂȘnes ou Livourne en Italie, de Barcelone, Almeria, Malaga et Algeciras en Espagne, ils embarquent Ă  bord d’un ferry Ă  destination du nord du Maroc. En 2011, une flotte de 31 ferries est opĂ©rationnelle sur ces lignes. D’un opĂ©rateur Ă  l’autre les critĂšres de confort et de modernisme peuvent diffĂ©rer sensiblement. Matthew Murtland 2011 met en exergue la qualitĂ© mĂ©diocre des ferries marocains. Cette idĂ©e est confirmĂ©e par l’ñge moyen de la flotte des opĂ©rateurs marocains du dĂ©troit, IMTC et Comarit, dont les navires affichent respectivement des moyennes d’ñge de 35 et 31 ans alors que ceux de FRS, Acciona Trasmediterranea et Balearia, les opĂ©rateurs espagnols, ont quant Ă  eux des moyennes d’ñge de 17, 16 et 10 ans. Ce dĂ©calage qui existe entre une flotte vieillissante et un marchĂ© en expansion peut s’expliquer, entre autres, par le caractĂšre extrĂȘmement saisonnier de cette mobilitĂ© massive. Illustration 3 - Trafics passagers des ports du dĂ©troit et de la mer d’Alboran en 2007 Nora MareĂŻ. Du mondial au local, un espace dĂ©sarticulĂ© 14Le dĂ©troit de Gibraltar est un espace oĂč les circulations humaines et marchandes sont les principales animatrices des territoires. Elles dynamisent les lieux et rythment l’investissement qui consiste au dĂ©veloppement d’une nouvelle offre de transport afin d’accueillir des flux en augmentation continue. Par la mise en place de ces infrastructures, principalement portuaires, l’objectif recherchĂ© est de s’accrocher aux flux mondiaux ; la gestion de ces flux devrait permettre de crĂ©er de l’argent et d’impulser du dĂ©veloppement. D’une rive Ă  l’autre, les prises de dĂ©cisions Ă©tablissent alors l’infrastructure comme l’instrument essentiel du dĂ©veloppement territorial projetant ainsi les territoires dans le mythe politique des effets structurants des infrastructures de transport Offner, 1993. Cependant, la trop forte mise sur un dĂ©veloppement capitalistique et Ă©conomique comporte un risque de dysfonctionnement et de dĂ©sarticulation spatiale sur un espace littoral sinistrĂ© d’un point de vue socio-Ă©conomique et fragile d’un point de vue environnemental. La construction d’un espace oĂč les intĂ©rĂȘts extraterritoriaux priment OpĂ©rateurs maritimes et dynamisme portuaire 15L’insertion des ports du dĂ©troit dans les principaux rĂ©seaux conteneurisĂ©s de la planĂšte a comme consĂ©quence une appropriation complĂšte du dynamisme portuaire par des intĂ©rĂȘts extraterritoriaux, en particulier ceux des plus grands opĂ©rateurs mondiaux du transport maritime Maersk, 1er armateur mondial en 2011 ; CMA-CGM, 3e ; Hanjin Shipping, 9e. S’ils participent Ă  la construction des infrastructures portuaires de derniĂšre gĂ©nĂ©ration, leur intĂ©rĂȘt, en tant que transporteur, est donc essentiellement de dĂ©velopper leur activitĂ© vers les avant-pays marins. Il est donc peu probable que ces opĂ©rateurs amĂšnent des possibilitĂ©s importantes d’enracinement territorial et ceci est d’autant plus vrai que le port concernĂ© est un hub. En effet, la valeur ajoutĂ©e de la fonction portuaire est trĂšs dĂ©pendante du type de trafic, et les conteneurs ne sont pas Ă  ranger parmi les trafics les plus intĂ©ressants de ce point de vue. En particulier, l’activitĂ© de transbordement est en gĂ©nĂ©ral peu inductrice de valeur ajoutĂ©e locale, elle emploie une faible main-d'Ɠuvre et elle peut ĂȘtre trĂšs vulnĂ©rable en cas de forte concurrence. Les autoritĂ©s portuaires qui arrivent Ă  bĂ©nĂ©ficier de belles plus-values sont celles qui ont dĂ©veloppĂ© un fort potentiel industriel et logistique pĂ©ri-portuaire en investissant, par exemple, dans des zones d’activitĂ© spĂ©cialisĂ©es et extrĂȘmement bien connectĂ©es Ă  leur arriĂšre-pays. En ce qui concerne l’autoritĂ© portuaire d’Algeciras, la prise en compte de ces principes de massification des trafics est trĂšs rĂ©cente et les moyens mis en Ɠuvre pour y arriver sont encore balbutiants. Tanger-Med, le modĂšle du dĂ©veloppement asiatique importĂ© en MĂ©diterranĂ©e 16A Tanger Med, la donne est d’emblĂ©e diffĂ©rente car le projet est prĂ©sentĂ© comme une proposition globale d’amĂ©nagement de la rĂ©gion du TangĂ©rois. Il est confiĂ© Ă  une agence publique créée en 2002, l’Agence SpĂ©ciale Tanger MĂ©diterranĂ©e TSMA dont les compĂ©tences sont portuaires mais Ă©galement terrestres puisqu’elle est dĂ©signĂ©e comme l’amĂ©nageur de la Zone SpĂ©ciale de DĂ©veloppement ZSD créée pour accompagner le projet. Cependant, comme Ă  Algeciras, la concession des terminaux est dĂ©volue Ă  des sociĂ©tĂ©s privĂ©es Maersk et CMA-CGM ont remportĂ© les plus importantes concessions, Tanger Med s’inscrivant dans une rĂ©forme radicale du systĂšme portuaire marocain. Si la concession des terminaux conteneurs reste au cƓur du projet, l’originalitĂ© est Ă  observer dans la crĂ©ation de cette ZSD qui consiste en la mise en place de zones d'activitĂ©s intĂ©grĂ©es et de zones franches logistique, commerciale et industrielle comme celle de Melloussa 600 ha, orientĂ©e vers les activitĂ©s d'exportation et qui accueillera Renault sur 300 ha en 2012. 17MĂȘme si le projet a rencontrĂ© quelques succĂšs commerciaux grĂące Ă  l’arrivĂ©e de nouveaux investisseurs au Maroc, le principe mĂȘme de zones franches interpelle quant Ă  ses effets sur le dĂ©veloppement des territoires. En effet, les avantages d’une telle zone sont liĂ©s Ă  des lĂ©gislations fiscales extrĂȘmement permissives pas de droits de douane, pas de TVA, pas d’impĂŽts sur les sociĂ©tĂ©s pendant cinq ans, rapatriement de capitaux en devises Ă©trangĂšres, etc.. Ce sont des zones qui fonctionnent donc de maniĂšre isolĂ©e par rapport Ă  leur espace d’accueil. Les spĂ©cialistes du bureau international du travail BIT reconnaissent la difficultĂ© d’évaluer la contribution de ces zones dĂ©fiscalisĂ©es au dĂ©veloppement socio-Ă©conomique, tout en relevant leurs rĂ©sultats sur l’emploi, la diversification du tissu Ă©conomique, et l’attraction des investissements Ă©trangers. Dans cette perspective, l’objectif de faire de la ZSD une zone atelier, place alors les responsables marocains dans une optique complĂštement diffĂ©rente de celle d’Algeciras. L’appel Ă  l’investissement Ă©tranger et la mise en place d’une industrie de main-d’Ɠuvre Ă  vocation exportatrice comme l’assemblage automobile sont alors prĂ©sentĂ©s comme les clefs du dĂ©veloppement de la rĂ©gion. De telles entreprises ont connu quelques succĂšs en particulier en Asie Chine, Singapour, Malaisie. Cependant pour de nombreuses zones de ce genre, il est difficile de sortir du cercle vicieux d’une production Ă  faible valeur ajoutĂ©e et sans montĂ©e en gamme, les effets sur le dĂ©veloppement ne vont guĂšre plus loin que la crĂ©ation de quelques emplois sous-qualifiĂ©s BIT, 2003 ; Bost, 2007. 18Ainsi, dans un cas comme dans l’autre, les choix politiques en termes d’amĂ©nagements portuaires et pĂ©ri-portuaires semblent loin de l’enracinement territorial tant souhaitĂ© sur ces espaces oĂč les besoins socio-Ă©conomiques sont Ă©normes. D’ailleurs, de maniĂšre assez symptomatique, le commerce extĂ©rieur marocain n’est responsable Ă  Tanger Med que de 46 228 EVP en 2009, soit moins de 4 % du trafic global du hub. Une dĂ©gradation sensible de l’environnement marin et cĂŽtier du dĂ©troit 19L’intensification de l’activitĂ© humaine sur les littoraux peut ĂȘtre source de tensions sur les espaces marins et cĂŽtiers environnants, en particulier lorsqu’il s’agit de dĂ©velopper des infrastructures lourdes et dĂ©voreuses d’espace, telles les zones portuaires et industrielles. Un port performant est un port prĂ©sentant des profondeurs suffisantes afin d’accueillir les plus gros navires de la flotte mondiale et des espaces de stockage consĂ©quents pour hĂ©berger, entre autres, les milliers de conteneurs en attente de transbordement ou d’évacuation vers l’arriĂšre-pays. Pour rĂ©pondre Ă  ces critĂšres physiques de performance, sur les cĂŽtes escarpĂ©es du dĂ©troit de Gibraltar, les ports ont Ă©tĂ© construits par remblaiement sur les plus grandes baies existantes et par extension de ces remblais en mer. Dans la baie d’Algeciras, 610 hectares ont Ă©tĂ© gagnĂ©s sur la baie en un siĂšcle et le mouvement de remblaiement n’est pas achevĂ© port d’Algeciras et de Gibraltar. Sur le site de l’Oued R’Mel oĂč a Ă©tĂ© construit Tanger-Med, la phase 1 du projet Ă  consister Ă  construire une centaine d’hectares de terminaux portuaires intĂ©gralement gagnĂ©s sur la mer illustration 4. Ces constructions lourdes sont responsables de perturbations importantes dans le dynamisme morpho-sĂ©dimentaire des plages du dĂ©troit Ă©rosion au point que plusieurs campagnes de rechargement en sable des plages de la baie d’Algeciras ont Ă©tĂ© menĂ©es ces derniĂšres annĂ©es. Il faut ajouter Ă  ces remblaiements strictement cĂŽtiers ceux des zones rĂ©tro-littorales correspondant aux zones d’activitĂ©s Ă©conomiques ou logistiques et qui participent alors Ă  l’impermĂ©abilisation des sols dans des zones soumises Ă  de fortes intempĂ©ries hivernales. Illustration 4 – Evolution diachronique des infrastructures portuaires de Tanger-Med Source TMSA, images Google Earth ; rĂ©alisation N. MareĂŻ. 20Outre ces dĂ©sĂ©quilibres les plus visibles, il ne faut pas omettre les risques liĂ©s Ă  la fonction de zone de transit et d’escale internationale pour une grande partie de la flotte mondiale. Les accidents maritimes ne sont pas rares dans le dĂ©troit et leurs effets sont souvent amplifiĂ©s par le mauvais temps et la lenteur d’intervention dans des eaux sans souverainetĂ© officielle. Le 12 aoĂ»t 2007, le vraquier panamĂ©en New Flame a heurtĂ© le pĂ©trolier danois Torm Gertrud alors qu’il sortait du port de Gibraltar. À la suite de cette collision, le cargo New Flame s'est Ă©chouĂ© face Ă  la pointe de l’Europe Gibraltar. Pendant six mois, aucune solution n’a Ă©tĂ© apportĂ©e Ă  l’échouage du bateau jusqu’à ce que le 10 fĂ©vrier 2008, une tempĂȘte provoque une fuite d'hydrocarbures provenant du cargo, polluant ainsi 1,5 km de cĂŽtes espagnoles. La mĂȘme annĂ©e le Sierra Nava, navire frigorifique battant pavillon panamĂ©en, s’est Ă©chouĂ© sur une plage du sud de la baie d’Algeciras et a contaminĂ© aux hydrocarbures 1 kilomĂštre de cĂŽtes. A ces accidents graves, il faut ajouter une pollution manifeste des eaux causĂ©e par des dĂ©gazages sauvages, les fuites liĂ©es Ă  l’activitĂ© de soutage et considĂ©rĂ©es comme frĂ©quentes par les associations Ă©cologistes, les dĂ©versements industriels de la baie d’Algeciras et l’évacuation directe en mer des eaux usĂ©es de l’ensemble des villes du dĂ©troit. 21Tous ces risques marins et cĂŽtiers sont retrouvĂ©s sur l’ensemble du pourtour mĂ©diterranĂ©en oĂč le littoral subit un surinvestissement Ă©conomique industrie portuaire, tourisme, villes pluri-millionnaires, etc.. Le cas du dĂ©troit de Gibraltar n’est donc pas isolĂ©, il interpelle simplement par la suraccumulation et la fragilitĂ© visible d’un littoral rĂ©cemment classĂ© pour sa richesse Ă©cologique. Une augmentation des effets de fermeture et d’enclavement spatiaux 22Le dernier risque majeur pour les riverains du dĂ©troit est une augmentation des effets frontiĂšres ». Ces effets sont dus Ă  l’existence de flux illĂ©gaux qui traversent les territoires riverains du dĂ©troit de Gibraltar et qui obligent Ă  la crĂ©ation d’une zone mirador » avec systĂšmes radar de surveillance de dĂ©troit SIVE, patrouilles renforcĂ©es, et militarisation des frontiĂšres, afin de prĂ©venir l’immigration clandestine, le trafic de drogue, la contrebande. 23La configuration politique et gĂ©ographique du dĂ©troit, bousculĂ©e par un jeu d’enclaves stratĂ©giquement positionnĂ©es et inlassablement contestĂ©es et revendiquĂ©es, favorise l’émergence d’un courant d’échange illicite. Il s’explique d’une part par le fonctionnement Ă©conomique des enclaves de Gibraltar et de Ceuta proche de celui d’un port franc et d’autre part par le va-et-vient rĂ©gulier de travailleurs vivant dans l’arriĂšre-pays andalou ou rifain. L’existence de marchandises dĂ©taxĂ©es et la possibilitĂ© de les faire traverser la frontiĂšre moyennant quelques ruses et la corruption de quelques douaniers, alimentent alors rĂ©guliĂšrement un courant de contrebande. Cigarettes et alcool en provenance de Gibraltar sont aisĂ©ment retrouvĂ©s dans les rues andalouses ; quant aux Marocains, ils sont Ă  la recherche d’électromĂ©nager de tous types en provenance d’Europe. 24Ces flux marchands illĂ©gaux sont accompagnĂ©s d’une mobilitĂ© humaine clandestine stoppĂ©e par la coupure d’eau Ă  franchir que reprĂ©sente le dĂ©troit et par la double barriĂšre barbelĂ©e et militarisĂ©e de la frontiĂšre de Ceuta. Ces obstacles n’arrĂȘtent Ă©videmment pas les candidats au passage vers l’Europe. Ils rĂŽdent Ă©galement aux entrĂ©es du port de Tanger Ă  la recherche d’une faille dans le systĂšme de surveillance leur permettant alors d’embarquer furtivement dans un navire, sous les essieux d’un camion, dans une remorque, etc. Selon une Ă©tude du ministĂšre de l’économie et des finances marocain 2008, 0,5 % Ă  1 % des chargements sont affectĂ©s par ces problĂšmes de sĂ»retĂ©. La migration de l’activitĂ© roulier-passager ro-pax vers Tanger-Med, au sein d’un port hors de la ville, aux derniĂšres normes de sĂ©curitĂ©, et isolĂ© par la mer d’un cĂŽtĂ©, la montagne de l’autre, permet d’une certaine maniĂšre de remĂ©dier Ă  ces difficultĂ©s. Pourtant, cette situation prĂ©sente une part de paradoxe puisque partout dans le monde l’activitĂ© ferry est par essence la plus urbaine » des activitĂ©s portuaires. 25Enfin, d’un point de vue Ă©conomique, le pari marocain sur les zones franches n’est pas dĂ©nuĂ© de risques puisqu’il favorise un mitage dĂ©fiscalisĂ© » des territoires, sans garantie de rĂ©sorber les Ă©quilibres spatiaux, et avec l’éventualitĂ© de crĂ©er une parcelle de modernitĂ© et de richesse aux intĂ©rĂȘts exclusivement extraterritoriaux Coudroy de Lille, 2007. Emergent alors le long des cĂŽtes du dĂ©troit divers Ăźlots politiques, Ă©conomiques, militaires, qui fractionnent de plus en plus des territoires dĂ©jĂ  peu articulĂ©s. Le dĂ©troit de Gibraltar, un espace pertinent d’intĂ©gration territoriale ? 26Parler d’intĂ©gration territoriale sur un espace si complexe peut paraĂźtre un vƓu pieux au regard des modalitĂ©s politiques, socio-Ă©conomiques et environnementales qui viennent d’ĂȘtre passĂ©es en revue. Or c’est une piste Ă  explorer afin d’articuler le rĂ©seau mondial Est-Ouest dans lequel est insĂ©rĂ© le dĂ©troit et le systĂšme local Nord-Sud en demande d’opportunitĂ©s de dĂ©veloppement. Ici, en particulier, le contact fragile entre la mondialisation et ses marges est exacerbĂ© au risque de faire du dĂ©troit un simple lieu de transit d’hommes et de marchandises. Penser Ă  une intĂ©gration rĂ©gionale d’un genre nouveau puisque intercontinentale et euro-africaine est alors peut-ĂȘtre une nouvelle voie du dĂ©veloppement pour les territoires marginaux et frontaliers de l’espace europĂ©en. Les efforts Ă  rĂ©aliser en vue d’une intĂ©gration rĂ©gionale 27Un projet de gestion commune d’une zone transfrontaliĂšre nĂ©cessite, outre une volontĂ© politique forte et partagĂ©e, une certaine harmonie sociale, Ă©conomique et politique entre les participants. Une Ă©volution de ce type sur le dĂ©troit de Gibraltar implique alors que la rĂ©gion du TangĂ©rois effectue un vĂ©ritable rattrapage en terme de dĂ©veloppement Ă©conomique, le projet Tanger-Med se prĂ©sente comme le reflet des aspirations marocaines. Le Maroc devra Ă©galement imposer une rĂ©elle politique de rĂ©gionalisation en octroyant Ă  la rĂ©gion [du Rif ou du Tangerois] une responsabilitĂ© financiĂšre accrue », car la coopĂ©ration imaginĂ©e n’est pas intergouvernementale mais bien interrĂ©gionale entre des acteurs et des territoires partageant les mĂȘmes attaches pour l’espace en question Cherkaoui, 2006. D’autant plus que l’Andalousie voisine est une CommunautĂ© Autonome avec ses propres instances politiques, financiĂšres et lĂ©gislatives. Il est possible d’imaginer qu’au sein de cet espace solidaire, les plates-formes d’éclatement de Tanger-Med et Algeciras coopĂ©reraient, ce qui offrirait une capacitĂ© d’accueil de quasi 15 millions de conteneurs pour le dĂ©troit, devenant ainsi la premiĂšre zone conteneurisĂ©e de l’espace euro-mĂ©diterranĂ©en. 28Toutefois, sans solution politique pour Ceuta et Gibraltar, le statut quo risque de s’éterniser. Certains responsables espagnols accusent mĂȘme le Maroc de vouloir casser l’économie de Ceuta avec le projet Tanger-Med. Pourtant, une cogestion de Ceuta avec le Maroc et de Gibraltar avec le Royaume-Uni est envisageable en raison de l’évolution socioculturelle des enclaves. Dans ces enclaves les brassages ethniques sont plurisĂ©culaires et la proportion des rĂ©sidents marocains Ă  Ceuta ou espagnols Ă  Gibraltar a considĂ©rablement augmentĂ©. Yves Zurlo 2006 parle, concernant Ceuta et Melilla autre enclave espagnole au Maroc, de laboratoire de convivencia signifiant vie en commun en espagnol. Pourtant, les enclaves semblent Ă©voluer plutĂŽt vers l’autonomie politique que la gestion commune. Les obstacles Ă  l’intĂ©gration 29Les obstacles Ă  l’intĂ©gration sont encore de taille et ils sont Ă  chercher dans les nombreux paradoxes qui Ă©mergent de la trop grande dĂ©sarticulation entre les enjeux locaux et le systĂšme mondial qui s’y superposent. 30En effet, la permanence des rĂ©seaux illĂ©gaux de l’immigration et de la contrebande est alimentĂ©e par les Ă©carts croissants de dĂ©veloppement entre les deux rives, et ces rĂ©seaux ne cessent de se dĂ©velopper malgrĂ© les stratĂ©gies sĂ©curitaires de barricadement de l’espace europĂ©en. 31Ensuite, la faveur actuelle donnĂ©e au dĂ©veloppement Ă©conomique a de nombreux effets pervers. D’un point de vue social, le succĂšs des projets en cours est loin d’ĂȘtre avĂ©rĂ© et les voies souhaitables Ă  une inversion des tendances ne semblent pas celles choisies pour le moment. D’un point de vue environnemental, il est certain que les projets en cours se sont complĂštement affranchis des normes ou des lĂ©gislations qui existent puisque une grande partie des espaces maritimes et terrestres du dĂ©troit de Gibraltar sont rĂ©glementĂ©s par des zonages de protection de niveau rĂ©gional Ă  europĂ©en. 32Ces dysfonctionnements amĂšnent alors Ă  la construction d’un espace paradoxal, mais Ă  l’image du monde, oĂč tout est mis en place pour la fluiditĂ© et la gestion optimale des circulations marchandes alors que s’opposent barricades, postes de contrĂŽles et lĂ©gislations discriminatoires aux mobilitĂ©s humaines. Les premiers pas vers la gestion commune 33Pourtant, le tableau n’est pas complĂštement sombre sinon il serait illusoire de rĂ©flĂ©chir Ă  des perspectives d’intĂ©gration. 4 Le Marin, 4-05-07. 34Le Maroc effectue prĂšs des deux tiers de son commerce extĂ©rieur avec l’Union EuropĂ©enne dont 22,1 % avec la France, suivie de l'Espagne 13,2 %, de l'Italie 5,9 %, de l'Allemagne 4,2 % et de la Grande-Bretagne 3,6 %4. Cette situation lui a valu d’obtenir, en 2008, un statut avancĂ© avec l’ dans le cadre de sa politique de voisinage. Il est le premier pays sud-mĂ©diterranĂ©en Ă  entrer dans cette catĂ©gorie et Ă  renforcer ainsi ses liens politiques et Ă©conomiques avec l’UE dans l’objectif d’intĂ©grer Ă  terme le marchĂ© unique europĂ©en. Il est, en particulier, un partenaire politique privilĂ©giĂ© de l’Espagne puisqu’ils sont souvent obligĂ©s de coopĂ©rer en matiĂšre de gestion des flux migratoires. De 1956 Ă  2004, soit en 50 ans de relations de voisinage, l’Espagne et le Maroc ont signĂ© 104 accords dont plus d’un tiers concernent le dĂ©troit de Gibraltar, les modalitĂ©s de circulation des personnes et la coopĂ©ration entre les autoritĂ©s de frontiĂšres RamĂłn Remacha, 2006. Cette consolidation des liens euro-chĂ©rifiens est un prĂ©alable Ă  une coopĂ©ration plus Ă©troite de type intĂ©gration frontaliĂšre entre le TangĂ©rois et l’Andalousie. Ces rĂ©gions auraient incontestablement un rĂŽle Ă  jouer dans une politique de voisinage encore plus Ă©troite avec le Maroc, ne serait-ce que dans la rĂ©ception et la gestion du flux commercial. Une telle situation serait bĂ©nĂ©fique Ă  une massification des trafics et Ă  une extension des arriĂšre-pays des ports de Tanger-Med et d’Algeciras. 35Enfin, Ă  l’échelle rĂ©gionale, ce sont les questions environnementales qui ont connu les avancĂ©es les plus significatives. En effet, le 25 octobre 2006, l’UNESCO a approuvĂ© le premier projet de RĂ©serve de BiosphĂšre Intercontinentale, proposĂ© par les comitĂ©s MaB Man and Biosphere de la rĂ©gion Andalousie et du royaume du Maroc. Le territoire proposĂ©, d’une superficie d’un million d’hectares, est dĂ©terminĂ© sur la base du large espace de communication entre le continent europĂ©en et le continent africain, constituĂ© par le sud de l’Andalousie et le nord du Maroc, englobant donc tout le dĂ©troit de Gibraltar et les nombreux parcs naturels, rĂ©serves naturelles, monumentos naturales, et sites d’intĂ©rĂȘts biologiques et Ă©cologiques des deux rives. La gestion commune de tous ces espaces protĂ©gĂ©es favorise une politique commune de conservation et d’usage des ressources naturelles, premiers pas communs vers une intĂ©gration rĂ©gionale des territoires frontaliers du dĂ©troit de Gibraltar. Conclusion 36Le dĂ©troit de Gibraltar est traversĂ© par des flux et des influences multiples, parfois opposĂ©s, qui en font un espace original d’observation de la mondialisation et de ses effets sur les territoires. L’espace en question rĂ©vĂšle aujourd’hui une offre de transport renouvelĂ©e et moderne qui permet une intĂ©gration des territoires riverains aux rĂ©seaux du transport mondial. Cependant, la faible articulation entre les logiques commerciales d’une part et les intĂ©rĂȘts Ă©conomiques et sociaux locaux d’autre part laisse entrevoir certaines frictions territoriales capables de fragiliser l’espace en construction. S’oppose alors sur ce territoire un espace de la fluiditĂ© entretenu par des intĂ©rĂȘts extĂ©rieurs, celui des flux Est-Ouest, et un espace de la fixitĂ© aux rĂ©alitĂ©s multi-scalaires et imposĂ© par les difficultĂ©s de la relation Nord-Sud Hesse et Rodrigue, 2004. Les tensions engendrĂ©es par la fragilitĂ© du territoire invitent alors Ă  une rĂ©flexion sur une coopĂ©ration et une solidaritĂ© entre les deux rives afin de dĂ©passer les difficultĂ©s liĂ©es Ă  la fragmentation spatiale de ce terraquĂ©. 37Unir les deux rives d’un dĂ©troit par une coopĂ©ration transfrontaliĂšre est un systĂšme qui a dĂ©jĂ  fait ses preuves depuis 1997 sur les rivages de l’Øresund et qui est Ă  l’étude sur le Pas de Calais programme europĂ©en Interreg IVA France Manche – Angleterre. La difficultĂ© de ce genre de projets rĂ©side dans le fait que les rivages d’un dĂ©troit sont souvent isolĂ©s par la coupure d’eau qui s’oppose Ă  leur mise en contact. En recentrant les enjeux sur la gestion de cette coupure d’eau, ils font alors de la mer le support de l’espace en construction. De sĂ©paratrice la mer devient intĂ©gratrice, animant ainsi le terraquĂ© qu’elle a formĂ©. Sur l’Øresund comme sur le Pas de Calais, les deux rives sont dorĂ©navant unies par un lien fixe. Projet qui existe sur le dĂ©troit de Gibraltar depuis 1869, preuve d’une volontĂ© ancienne de lier les deux rives, et pour lequel des Ă©tudes de faisabilitĂ© ont Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©es au cours des dĂ©cennies 1980 et 1990. Mais cette union euro-africaine prĂȘte encore Ă  controverse, Ă  l’heure d’une Europe de plus en plus protectrice Ă  l’égard de ses frontiĂšres extĂ©rieures. Ilinsiste sur le fait que la zone de rĂ©alisation du projet dans le dĂ©troit de Gibraltar est particuliĂšre en raison de sa proximitĂ© avec trois grands ports (AlgĂ©siras, Tanger et Tanger Med) et deux ports de taille moyenne (Cadix et Ceuta).
Le dĂ©troit de Gibraltar est le seul lien naturel entre l'ocĂ©an Atlantique et la MĂ©diterranĂ©e et l'une des voies navigables les plus frĂ©quentĂ©es du monde. Le dĂ©troit est aussi un point de rencontre pour les amoureux de la nature, d'oĂč l'on peut observer des baleines, des dauphins et des oiseaux migrateurs. Le dĂ©troit de Gibraltar - Origine et importance pour la nature Straße von Gibraltar mit Richtung des Schiffsverkehrs Le dĂ©troit de Gibraltar relie l'Atlantique et la MĂ©diterranĂ©e, il mesure environ 60 kilomĂštres de long et entre 14 et 44 kilomĂštres de large. Le dĂ©troit de Gibraltar est le seul lien naturel entre l'ocĂ©an Atlantique et la mer MĂ©diterranĂ©e et l'une des voies navigables les plus frĂ©quentĂ©es du monde. environs 300 navires traversent le dĂ©troit en 24 heures, soit un navire toutes les 5 minutes. En raison des courants d'eau spĂ©cifique, la nourriture est trĂšs bonne, ce qui attire mĂȘme les baleines et les dauphins. Ici, dans le sud de l'Espagne, vous avez l'occasion d'observer les mammifĂšres marins fascinants en compagnie de firmm. Le point le plus Ă©troit du dĂ©troit est prĂšs de Tarifa, la ville la plus mĂ©ridionale du continent europĂ©en. Il n'y a que 14 kilomĂštres jusqu'Ă  la montagne Jbel Musa au Maroc, Afrique. De nombreux oiseaux migrateurs traversent le dĂ©troit lors de leurs voyages entre l'Europe et l'Afrique. Un aperçu du prĂ©histoire Carte en relief du bassin mĂ©diterranĂ©en avec les rĂ©gions limitrophesRoger Pibernat sous la direction de Daniel Garcia-Castellanos Le bassin mĂ©diterranĂ©en actuel est un vestige de la mer de TĂ©thys, qui a pris naissance il y a environ 250 millions d'annĂ©es et a progressivement disparu en raison du dĂ©placement des plaques continentales. Lorsque la plaque africaine est entrĂ©e en collision avec le Proche-Orient il y a 15 millions d'annĂ©es, la connexion avec l'ocĂ©an Indien a d'abord Ă©tĂ© coupĂ©e. Il y a environ 6 millions d'annĂ©es, la liaison avec l'Atlantique Ă©tait Ă©galement fermĂ©e - on l'appelle la Rue BĂ©tique et elle Ă©tait lĂ  oĂč se trouve l'actuelle Malaga. Cette dĂ©rive des plaques continentales est d'ailleurs responsable de l'origine des CordillĂšres BĂ©tiques, une chaĂźne de montagnes dont fait partie la Sierra Nevada. Il y a environ 6 millions d'annĂ©es, la mer MĂ©diterranĂ©e s'Ă©tait assĂ©chĂ©e. La MĂ©diterranĂ©e Ă©tait complĂštement sĂ©parĂ©e de l'ocĂ©an et elle s'Ă©tait assĂ©chĂ©e avec le temps probablement sur plusieurs dizaines de milliers d'annĂ©es pour devenir un gigantesque dĂ©sert de sel. Aux endroits les plus profonds, des roches sĂ©dimentaires se sont dĂ©posĂ©s, contenant des sels restant aprĂšs l'Ă©vaporation. Cette Ă©poque est appelĂ©e la crise de salinitĂ© messinienne. A cette Ă©poque, le dĂ©troit de Gibraltar appartenait Ă  une chaĂźne de montagnes sans lien avec la mer - jusqu'Ă  il y a environ 5,3 millions d'annĂ©es, le pont terrestre entre l'Europe et l'Afrique se baissait lĂ©gĂšrement. L'eau est ensuite retournĂ©e dans le bassin mĂ©diterranĂ©en au dĂ©troit actuel de Gibraltar. Pendant plusieurs millĂ©naires, ce n'Ă©tait qu'une petite quantitĂ©. Mais l'eau s'est creusĂ©e de plus en plus profondĂ©ment dans le col terrestre et, avec le temps, des masses d'eau de plus en plus grandes se sont infiltrĂ©es, jusqu'Ă  ce que le niveau de l'eau de la MĂ©diterranĂ©e monte Ă  la fin, probablement jusqu'Ă  10 mĂštres par jour. Le dĂ©troit de Gibraltar aujourd'hui Sans le dĂ©troit de Gibraltar, cette connexion avec l'Atlantique, le niveau da la MĂ©diterranĂ©e se baisserait de 1,5 mĂštre chaque annĂ©e parce que les fleuves et les pluies ne peuvent pas compenser la perte d'eau par Ă©vaporation dans cette rĂ©gion chaude et sĂšche de la planĂšte. Environ 1 million de mĂštres cubes d'eau entrent par le dĂ©troit en direction de la MĂ©diterranĂ©e chaque seconde, ce qui correspond Ă  un cube d'eau de 100 mĂštres. Il s'agit d'un courant d'eau fraĂźche Ă  la surface du dĂ©troit. En raison de sa forte teneur en sel, l'eau de la MĂ©diterranĂ©e est plus lourde et se baisse dans le bassin mĂ©diterranĂ©en, repoussant les eaux profondes dans l'Atlantique. Dans les Ă©lĂ©vations et les dĂ©pressions du seuil de Gibraltar dans la zone du dĂ©troit, des turbulences se produisent, qui transportent de nombreux nutriments des profondeurs vers la surface. L'eau riche en nutriments et la lumiĂšre favorisent la formation de plancton vĂ©gĂ©tal phytoplancton - une condition prĂ©alable Ă  un approvisionnement alimentaire important. Les baleines et les dauphins en profitent Ă©galement. Il n'est donc pas surprenant que nous puissions rĂ©guliĂšrement observer sept espĂšces de baleines et de dauphins dans le dĂ©troit malgrĂ© le grand trafic qui produit un bruit Ă©norme. Limite de vitesse pour le dĂ©troit de Gibraltar Pour protĂ©ger les mammifĂšres marins, le ministĂšre espagnol de l'Environnement a fixĂ© une limite de vitesse de 13 nƓuds 24 km/h dans le dĂ©troit en fĂ©vrier 2007. firmm a Ă©tĂ© impliquĂ© de maniĂšre signifiante dans la dĂ©cision Nos annĂ©es de recherche ont contribuĂ© Ă  ce que ce sujet soit abordĂ©. Le dĂ©troit dans la mythologie Le Rocher de Gibraltar et le Mont Jbel Musa la montagne MoĂŻse au Maroc sont aussi connus comme les Piliers d'Hercule. Selon la mythologie grecque, Hercule a traversĂ© le mont Atlas pour voler le troupeau de bĂ©tail de GĂ©ryon. Cependant, avec sa force surhumaine, il perça la montagne au milieu et crĂ©a ainsi le dĂ©troit de Gibraltar. A la sortie de la MĂ©diterranĂ©e, il marque la fin du monde avec l'inscription "non plus ultra pas au-delĂ . Les piliers d'Hercule, y compris l'inscription, se sont retrouvĂ©s dans les armoiries espagnoles sous Charles Ier Ă©galement empereur allemand Charles V. Mais comme l'AmĂ©rique avait dĂ©jĂ  Ă©tĂ© dĂ©couverte, la devise a Ă©tĂ© changĂ©e pour PLUS ULTRA au-delĂ . Les colonnes et l'inscription dĂ©corent d'ailleurs aussi les armoiries nationales actuelles de l'Espagne.
Lenouveau port jouit d’une position stratĂ©gique unique Ă  zĂ©ro dĂ©viation pour les navires transitant par le DĂ©troit de Gibraltar. AnnoncĂ© depuis le dĂ©but de cette annĂ©e, TangeMed 2 a
Le DĂ©troit, Al Boughaz comme on dit Ă  Tanger est un espace mythique et aussi une dure rĂ©alitĂ©. Sas de la dĂ©couverte, de l’étonnement et du bonheur pour les uns, gigantesque douve naturelle de l’horreur et du dĂ©sespoir pour les autres. BarriĂšre ou passage voici le DĂ©troit. Vous dĂ©couvrirez dans cet article les multiples facettes du DĂ©troit de Gibraltar
 Depuis sa splendide baie, Tanger, la magicienne, contemple les noces de la MĂ©diterranĂ©e et de l’ocĂ©an Atlantique
 D’un seul regard, on embrasse l’Europe et l’Afrique une mer et un ocĂ©an avec, pour les unir, le dĂ©troit de Gibraltar. Lieu de rencontre et de passage trĂšs frĂ©quentĂ© et bien connu, non seulement des PhĂ©niciens et des peuples d’Afrique, mais aussi des Grecs et des Romains, et a fortiori des pouvoirs qui s’en sont disputĂ© le contrĂŽle au Moyen Âge, le dĂ©troit de Gibraltar n’en a pas moins Ă©tĂ© pensĂ© comme un seuil, une frontiĂšre, parfois une limite infranchissable, que ce soit de la mer vers l’OcĂ©an ou encore entre l’Europe et l’Afrique. Le DĂ©troit, un double miroir C’est lĂ  que la MĂ©diterranĂ©e se reflĂšte dans l’Atlantique et que l’Andalousie transparaĂźt dans le Maghreb. L’imaginaire relatif au DĂ©troit de Gibraltar, situĂ© aux confins du monde occidental, chargĂ© de mythes et de merveilleux, peuplĂ© de hĂ©ros et de monstres, a suscitĂ© un nombre impressionnant de recherches. Les Colonnes d’Hercule C’est le nom donnĂ©, dans l’AntiquitĂ©, aux montagnes qui bordaient le dĂ©troit de Gibraltar le Rocher de Gibraltar au Nord, sur la rive europĂ©enne, et le mont Abyle, aujourd’hui Jbel Musa, au Sud, sur la rive africaine. Le nom de Gibraltar n’apparaĂźt qu’à compter de 711 ; il vient de l’arabe Jebel Tariq, la montagne de Tariq, prĂ©nom du gĂ©nĂ©ral musulman Tariq ibn Ziyad qui, en avril 711, franchit le dĂ©troit pour conquĂ©rir la pĂ©ninsule ibĂ©rique. Le monument des colonnes d’Hercule Ă  Gibraltar. Elles portent ce nom car, selon la lĂ©gende, Hercule, lors de l’un des douze travaux, aurait, d’un coup de sabre, fendu le roc Ă  cet endroit, formant ainsi le dĂ©troit. Ces colonnes Ă©taient le symbole de la frontiĂšre entre le monde civilisĂ© et le monde inconnu. Enfin, Platon aurait placĂ© Atlantide dans le passage des Colonnes d’Hercule, dans l’un de ses derniers dialogues “TimĂ©e”. C’est le seul passage maritime entre l’ocĂ©an Atlantique et la mer MĂ©diterranĂ©e. Il est large de 14,4 km et d’une profondeur d’environ 300 m. Le dĂ©troit est considĂ©rĂ© comme faisant partie des eaux internationales. Symbolisant cette lĂ©gende d’Hercule, nous retrouvons sur la cĂŽte marocaine un site exceptionnel les Grottes d’Hercule, lien avec la mythologie qui situe au Maroc les Jardins des HespĂ©rides. Dans ces jardins, les trois filles du Titan Atlas gardaient les arbres aux pommes d’or protĂ©gĂ©es par un dragon Ă  cent tĂȘtes. Lors de son onziĂšme travail, Hercule, fils de Zeus tua le dragon et s’empara des fruits magiques qui garantissaient l’immortalitĂ©. FatiguĂ©, il se serait reposĂ© dans ces cavernes
 Le nouveau site des grottes d’Hercule Ă  Tanger Une voie de passage intercontinentale et interocĂ©anique majeure. Tout autour du dĂ©troit de Gibraltar trois Ă©tats ont pris place l’Espagne, le Maroc, le Royaume-Uni. Ils sont imbriquĂ©es les uns aux autres par un jeu d’enclaves maritimes. Cette situation le projette au centre de diffĂ©rents rĂ©seaux de circulations et de mobilitĂ©s internationales. Ces circulations, intĂ©grĂ©es dans les grands flux marchands et humains qui dominent la planĂšte, font toute l’attractivitĂ© des lieux et entraĂźnent une organisation maritime et terrestre singuliĂšre autour de ce seuil ocĂ©anique. En particulier, les infrastructures portuaires se sont dĂ©veloppĂ©es de maniĂšre spectaculaire et accueillent aujourd’hui les principaux transporteurs mondiaux. Le dĂ©troit devient un espace original oĂč se croisent le dense trafic marchand alimentant les Ă©changes entre Europe et Asie, et une circulation humaine de plus en plus intense, rĂ©vĂ©latrice des liens historiques entre l’Europe et l’Afrique. L’intense flux marchand de l’artĂšre maritime Est-Ouest est entrecoupĂ© par un trafic Nord-Sud qui n’a cessĂ© de prendre de l’ampleur au cours du XXe siĂšcle. Il s’agit d’une part, d’un courant marchand support d’une partie du commerce extĂ©rieur marocain avec l’Europe et d’autre part, d’un flux humain de plus de 5 millions de passagers dont 40 % traversent le dĂ©troit lors de la pĂ©riode estivale. L’ensemble de ces flux hisse le dĂ©troit au rang des dĂ©troits du Pas de Calais ou de Malacca en termes de trafic maritime international 100 000 navires par an, environ 300 par jour. Carrefour civilisationnel, culturel, Ă©conomique, commercial, le dĂ©troit de Gibraltar est un vĂ©ritable observatoire de la mondialisation. Aujourd’hui par ce dĂ©troit passent les rĂȘves, les utopies, les voyages, mais aussi toute la richesse du monde et ses piĂšges. D’un cĂŽtĂ© du dĂ©troit, l’Espagne adossĂ©e Ă  la riche Europe. De l’autre le Maroc et derriĂšre lui toute l’Afrique. Ce bras de mer de 14 kilomĂštres, qui sur les cartes sĂ©pare deux continents, est une frontiĂšre impossible. Le dĂ©troit s’est imposĂ© comme l’espace modĂšle de la frontiĂšrisation » de l’espace Schengen, mais aussi le symbole de son inefficacitĂ©. La rĂ©activitĂ© des migrants et leur capacitĂ© Ă  contourner les dispositifs europĂ©ens soulignent l’impuissance d’une politique de fermeture menĂ©e sans projet de dĂ©veloppement des pays Ă©metteurs. Le dĂ©troit sĂ©pare aussi l’Europe de l’Afrique. Des transbordeurs rapides et classiques assurent la liaison, pour le passage des personnes et des vĂ©hicules. C’est un point de passage de l’immigration clandestine vers l’Europe. Cette derniĂšre se fait aussi par traversĂ©e du dĂ©troit, parfois sur des embarcations de fortune causant de nombreux morts. Le chiffre fait l’objet d’une polĂ©mique il est d’au moins plusieurs dizaines par an, mais certains parlent de milliers. Faune et flore du DĂ©troit L’union des deux mers fait du milieu marin une enclave privilĂ©giĂ©e qui abrite une biodiversitĂ© exceptionnelle d’un intĂ©rĂȘt extraordinaire. La richesse de ses eaux permet de fixer Ă  l’annĂ©e une population de dauphins, globicĂ©phales, orques et baleines. Les poissons abondent Ă©galement mĂ©rous, congres, murĂšnes, dorades, loup, pagres, pageots, etc. Un petit tour Ă  la criĂ©e du port de Tanger vous donnera une bonne idĂ©e de la diversitĂ© de la faune. CĂŽtĂ© flore, tous ceux qui ont fait de la plongĂ©e au Maroc vous le diront les champs de gorgones, d’éponges et de corail sont bien rĂ©els ! Le climat de la zone se distingue par des tempĂ©ratures trĂšs douces et une saison sĂšche marquĂ©e par une absence totale de pluies. Au seuil du dĂ©troit, l’eau monte des profondeurs, riche en substance nutritive de la MĂ©diterranĂ©e et se mĂ©lange partiellement avec leau affluant de lAtlantique. C’est ce qui permet d’avoir une abondance de nourriture dont profitent les dauphins et les baleines. C’est pourquoi, la circulation active dans le dĂ©troit de Gibraltar compromet sensiblement certaines sortes de baleine. Pour leur protection une limitation de vitesse dans le dĂ©troit a Ă©tĂ© dĂ©cidĂ©e en fĂ©vrier 2007 par le ministĂšre de l’environnement. Les ferries Les ferries qui partent d’AlgĂ©siras, Tarifa ou Malaga ont deux destinations possibles dans la rĂ©gion du Cap Nord le port de Tanger-Med prĂšs de la ville de Tanger et le port de Ceuta prĂšs de la ville de TĂ©touan. Les bateaux rapides mettent seulement 45 minutes jusqu’à Ceuta et 1h30 pour aller Ă  Tanger-Med. Le Port Tanger Med Il est situĂ© Ă  Ksar Al Majaz dans le nord du Maroc, Ă  22 km Ă  l’est de Tanger et Ă  46 km au nord de TĂ©touan sur le dĂ©troit de Gibraltar en MĂ©diterranĂ©e. Il est situĂ© Ă  14 km Ă  peine des cĂŽtes espagnoles, et se trouve sur la voie de passage du commerce maritime mondial Est-Ouest entre l’Asie, l’Europe et l’AmĂ©rique du Nord. GrĂące Ă  cette position stratĂ©gique, Tanger Med est devenu une plateforme logistique aux portes de l’Europe en jouant sur le fonctionnement de la production en juste-Ă -temps. Le Port est situĂ© sur la seconde voie maritime la plus frĂ©quentĂ©e au monde, le dĂ©troit de Gibraltar avec plus de 100 000 bateaux par an. Son activitĂ© principale est le transbordement de conteneurs. Les portes-conteneurs gĂ©ants dĂ©barquent leurs marchandises sans dĂ©vier de leur route et repartent aussitĂŽt, Ă  charge ensuite Ă  de plus petits navires, ou feeders ships de desservir des ports de second ordre. Le Port Tanger Med est connectĂ© Ă  plus de 120 ports dans 50 pays au monde auquel il est reliĂ© par des lignes rĂ©guliĂšres hebdomadaires. Cette annĂ©e, Tanger Med pourrait traiter 3 millions de conteneurs, et devenir ainsi le plus grand port d’Afrique au niveau du transbordement. Le Port de Tanger ville Il ambitionne d’accueillir plus de 700 000 touristes Ă  moyen terme. Pour des excursions d’une journĂ©e ou un week-end, la ville de Tanger accueille annuellement plus de touristes provenant de l’Espagne. Ce chiffre est attendu Ă  la hausse grĂące Ă  la reconversion du port. Le port de Tanger ville Ă©tait le premier port de ferry du pays. Suite au projet de reconversion du port, Tanger Ville est destinĂ© Ă  devenir un port de plaisance et d’accueil des bateaux de croisiĂšre. Ainsi, aujourd’hui, la plus part du trafic ferry a Ă©tĂ© transfĂ©rĂ© vers le port de Tanger Med. Cependant deux compagnies effectuent encore des traversĂ©es vers le port de Tanger ville offrant ainsi la possibilitĂ© pour les touristes d’Espagne de visiter la ville de Tanger sur une ou deux journĂ©es. Un projet fou pour le DĂ©troit Le percement ou la construction d’un lien fixe a Ă©tĂ© une idĂ©e rĂ©currente depuis le dĂ©but des annĂ©es 80. Un accord entre l’Espagne et le Maroc a Ă©tĂ© signĂ© en 2003 pour une Ă©tude sur la construction d’un tunnel ferroviaire sous dĂ©troit. Le projet prĂ©voit une liaison de 42 km la distance d’un marathon, dont 27,7 km de tunnel sous-marin entre les villes de Tanger et Tarifa. Ce tunnel a de quoi faire rĂȘver par son caractĂšre aussi symbolique qu’ambitieux. Il est facile, par contre, de dresser la liste des arguments en sa dĂ©faveur par exemple le financement et la dangerositĂ© de construire un tel ouvrage dans une zone sismique. Aujourd’hui il se trouve que le Maroc a Ă©normĂ©ment Ă©voluĂ© dans ses relations avec l’ grĂące au statut avancĂ© dont il bĂ©nĂ©ficie. D’autre part le dĂ©veloppement des infrastructures routiĂšres et portuaires ont mis le sud de l’Europe Ă  60 mn de traversĂ©e pour camions et passagers depuis Tanger Med et Ă  40 mn de Tanger ville. Dino Sebti traverse le DĂ©troit Ă  la nage le 9 septembre 2016. Le patron de l’agence Sigma Technologie, Dino Sebti, a traversĂ© le dĂ©troit de Gibraltar le 9 septembre 2016 en 4h 18h pour les 18 km soit 4,2 km/h
 Fou, non ? Dino dĂ©clare La clĂ© de la rĂ©ussite de ce challenge consiste Ă  ne jamais paniquer. D’ailleurs, la plus grande prĂ©paration pour cette traversĂ©e a Ă©tĂ© mentale. Il fallait apprendre Ă  chasser les mauvaises pensĂ©es j’ai froid, je suis fatiguĂ©, je n’y arriverais pas, etc
 » AgĂ© de 51 ans, Dino Sebti, s’est entrainĂ© pendant plus d’un an avant d’effectuer cet exploit. Il Ă©tait accompagnĂ© par trois autres nageurs un Franco-amĂ©ricain, un Français et un Allemand Pierre Weisbein, Adrien Champoux, et Joseph Hess. Le DĂ©troit de tous les rĂȘves
 Paysage majestueux, le dĂ©troit change de visage au grĂ© du vent, des couleurs, des courants, de la visibilitĂ©. Le vent s’engouffre dans ce lieu non abritĂ©. Quand il souffle cĂŽtĂ© MĂ©diterranĂ©e, c’est le vent d’Est. On l’appelle Levante en Espagne et Chergui au Maroc. Venant de l’ouest, alors on l’appelle Poniente et Gharbi . Des milliers d’oiseaux sillonnent le ciel. Des chalutiers longent les cĂŽtes. Des cargos se dressent Ă  l’horizon. Des paquebots font escale dans les ports. C’est ici, lieu Ă©troit et profond oĂč s’entrechoquent les courants et les vents, porte sur le monde, lieu de passage, de rencontres et d’exil, que naissent, grandissent et se multiplient les rĂȘves et les dangers du dĂ©troit de Gibraltar
 L’ ailleurs » semble si proche. ThGW AlgĂ©siras, dĂ©troit de Gibraltar, Tanger, Tarifa
Dansle dĂ©troit de Gibraltar, Ă  la poursuite du haschich marocain Dans le dĂ©troit de Gibraltar (Espagne) - La vedette fait rugir ses moteurs, Sur le dĂ©troit de Gibraltar, quand souffle le levant, ce vent humide venu de l'est, les habituĂ©s savent que les bateaux de migrants sont rares. Trop dangereux. Sur la mer parfois houleuse, les embarcations risquent d'ĂȘtre dĂ©portĂ©es vers l'ocĂ©an Atlantique. Pour prendre le large, les candidats Ă  l'exil attendent le retour du ponant, le vent d'ouest, dans l'espoir que les vagues les poussent vers les cĂŽtes espagnoles. Ces derniers mois, les arrivĂ©es de migrants sur le littoral andalou en provenance du Maroc sont Ă  la hausse. Depuis le dĂ©but de l'annĂ©e, 27 000 migrants sont entrĂ©s en Espagne par la mer, plus du double qu'en 2017, pendant la mĂȘme pĂ©riode. La PĂ©ninsule est dĂ©sormais leur premiĂšre porte d'entrĂ©e en Europe, devant l'Italie. "Nous avons alertĂ© depuis longtemps les autoritĂ©s espagnoles", rappelle Maria Jesus Vega, du Haut Commissariat aux rĂ©fugiĂ©s de l'ONU HCR. En 2017, dĂ©jĂ , environ 22 000 personnes sont arrivĂ©es ici par voie maritime, contre 8 000 l'annĂ©e prĂ©cĂ©dente. Les anges gardiens du dĂ©troitDans les locaux de l'association humanitaire Tartessos, au fond d'une cour ombragĂ©e, Ă  Cadix, Branly, natif du Congo-Kinshasa, et Abdelkader, un Togolais, racontent leur traversĂ©e, trois jours plus tĂŽt. Tous deux semblent Ă©puisĂ©s. A la tombĂ©e de la nuit, ils sont montĂ©s dans le mĂȘme Zodiac, prĂšs de Tanger. Cap sur Tarifa, pointe Ă  l'extrĂȘme sud de l'Europe continentale. Ils Ă©taient 45, entassĂ©s dans un bateau en plastique, dont dix femmes et deux bĂ©bĂ©s. "DĂšs le dĂ©part, la mer Ă©tait agitĂ©e, raconte Abdelkader. Le passeur avait parlĂ© d'une traversĂ©e de cinq heures. Onze heures plus tard, les vagues Ă©taient dĂ©chaĂźnĂ©es, le rivage hors d'atteinte. Nous Ă©tions transis de peur et de froid. Heureusement, l'un d'entre nous avait le numĂ©ro d'une certaine Helena." BasĂ©e Ă  Tanger, Helena Maleno, de l'ONG Caminando fronteras, sorte d'ange gardien du dĂ©troit, informe le quartier gĂ©nĂ©ral de Salvamento maritimo, les secours maritimes espagnols, de la prĂ©sence d'embarcations en danger. Des volontaires de la Croix-Rouge apportent une premiĂšre assistance aux migrants recueillis par le Luz de Mar. San Gonzalo Höhr Zamora pour L'ExpressOffre limitĂ©e. 2 mois pour 1€ sans engagement Pourquoi l'Espagne ? La fermeture des autres routes - celle de la MĂ©diterranĂ©e orientale, via la Turquie et la GrĂšce, aprĂšs l'accord signĂ© en mars 2016 entre l'Union europĂ©enne et Ankara, puis celle de la MĂ©diterranĂ©e centrale par l'Italie - conduit les candidats au dĂ©part Ă  essayer une autre voie d'accĂšs. "En Afrique comme au Maroc, les causes de dĂ©part n'ont pas changĂ©, explique Mehdi Lahlou, professeur Ă  l'Institut national de statistique et d'Ă©conomie appliquĂ©e, Ă  Rabat. Mauvaise gouvernance, corruption, violence. Elles se sont mĂȘme aggravĂ©es." DIAPORAMA >> Les migrants de Gibraltar "Au Maroc, les troubles sociaux dans plusieurs rĂ©gions ont sans doute aussi Ă©loignĂ© une partie des forces de sĂ©curitĂ© de la surveillance des cĂŽtes", diagnostique de son cĂŽtĂ© Ignacio Cembrero, journaliste espagnol spĂ©cialiste du royaume chĂ©rifien. Au siĂšge de la Guardia civil la gendarmerie Ă  AlgĂ©siras, des agents surveillent sur leurs Ă©crans les mouvements au large des bateaux. Une multitude de points verts et bleus constellent les Ă©crans du systĂšme intĂ©grĂ© de surveillance extĂ©rieure Sive, des plaisanciers pour la plupart. Quand apparaĂźt un point rouge au parcours inhabituel, il suffit de pointer le curseur sur lui pour que les radars et les camĂ©ras situĂ©es sur les montagnes alentour zooment sur l'embarcation. En cas de besoin, les vedettes de la gendarmerie seront mobilisĂ©es, parfois pour intercepter une patera, un canot de migrants, souvent pour traquer des trafiquants de haschisch. "9 pateras sur 10 quittent le rivage marocain au large de Tanger, Ă  l'ouest du dĂ©troit de Gibraltar", moins surveillĂ©, explique le sous-lieutenant Fuentes, l'oeil rivĂ© sur son Ă©cran. De lĂ , ils font appel Ă  la sĂ»retĂ© maritime espagnole, autorisĂ©e, selon un accord entre les deux pays, Ă  porter assistance dans les eaux marocaines. Ecoutez Catherine GouĂ«set nous raconter son enquĂȘte auprĂšs des migrants en Andalousie sur Soundcloud. Au dĂ©but de l'Ă©tĂ©, lorsque les conditions mĂ©tĂ©o favorables ont entraĂźnĂ© une nette hausse des arrivĂ©es, l'Etat a semblĂ© dĂ©passĂ©. Les communes du littoral ont improvisĂ©, au mieux de leurs moyens AlgĂ©siras, Barbate, Los Barrios, Tarifa ont ouvert des gymnases pour abriter les nouveaux venus. "Sans le moindre ventilateur, la chaleur y Ă©tait Ă©touffante, tĂ©moigne Palma Cadela de Isla, avocate bĂ©nĂ©vole. On informait les migrants sur les dĂ©marches Ă  suivre et on les dirigeait vers les associations les plus Ă  mĂȘme de leur venir en aide. La plupart des arrivants renoncent Ă  demander l'asile pour des raisons politiques ou humanitaires, mĂȘme quand c'est justifiĂ© ils ne peuvent apporter des Ă©lĂ©ments de preuve des persĂ©cutions subies." Avec le systĂšme intĂ©grĂ© de surveillance extĂ©rieure Sive, la Guardia civil garde un oeil sur les mouvements de bateaux en provenance du Gonzalo Höhr Zamora pour L'ExpressAprĂšs quelques semaines de pagaille, les autoritĂ©s ont fermĂ© les gymnases, au dĂ©but du mois d'aoĂ»t, et installĂ© deux centres d'accueil - l'un de 600 places, sur le site d'un ancien chantier naval Ă  San Roque, dans la baie d'AlgĂ©siras, l'autre de 700 lits, Ă  Chiclana, prĂšs de Cadix, administrĂ© par la Croix-Rouge. Trop peu, trop tard... Faute de place, les migrants sĂ©journent quelques jours dans les centres, guĂšre plus. Et le rĂŽle des ONG reste primordial. "Hier, nous avons Ă©tĂ© sollicitĂ©s pour aller chercher 14 jeunes au centre de Chiclana", raconte Gabriel Delgado, prĂȘtre chargĂ© de la question migratoire au diocĂšse de Cadix et l'un des responsables de Tartessos. "Ils restent ici le temps de souffler, de se retaper", ajoute-t-il. "LĂ -bas, il n'y a pas d'avenir pour les jeunes"Les locaux de l'association peuvent abriter 46 personnes, pas une de plus. Abdusalam, un Comorien ĂągĂ© de 23 ans, a traversĂ© le continent africain dans l'espoir d'une vie meilleure. "Il n'y a pas de travail lĂ -bas. Rien." Depuis quand est-il parti ? "Je ne sais plus. Ma tĂȘte a explosĂ©", confie-t-il, l'air absent. Sa famille s'est cotisĂ©e pour lui permettre de rejoindre son frĂšre Ă  Marseille. LĂ , "Inch' Allah !", il trouvera du travail pour venir en aide Ă  sa mĂšre et Ă  ses quatre soeurs, restĂ©es au pays. Un peu plus loin, Abdelkader Djobo, 37 ans, a fui la dictature du tyran togolais Faure GnassingbĂ©. Il vient du nord du pays, rĂ©putĂ© hostile au clan au pouvoir. "J'ai passĂ© deux ans en prison sans le moindre jugement." EscroquĂ© au Mali par un passeur qui lui faisait miroiter un visa pour les Etats-Unis, il a tout perdu. En Mauritanie, il s'est fait embaucher sur le port de Nouakchott, le temps de gagner de quoi rejoindre le Maroc. Deux ans de travail sur des chantiers Ă  Casablanca lui ont permis de rĂ©unir le pĂ©cule nĂ©cessaire Ă  la traversĂ©e. "1600 euros, lĂąche-t-il, quoique cela dĂ©pende de la nĂ©gociation... Je n'ai plus un sou. J'ai des amis Ă  Pampelune [Navarre], qui travaillent dans les champs. Je vais essayer de les rejoindre." Originaire du nord du Togo, Abdelkader Djobo a fui la rĂ©pression du rĂ©gime de Faure Gonzalo Höhr Zamora pour L'Express"Tous ces malheureux viennent moins parce qu'ils sont attirĂ©s par l'Europe que parce qu'ils fuient leur pays", constate Juan JosĂ© Tellez, Ă©crivain et journaliste de Cadix, spĂ©cialiste des migrations. La majoritĂ© des nouveaux venus proviennent d'Afrique subsaharienne. Moins de 15 % d'entre eux sont originaires du Maroc, parmi ceux arrivĂ©s cette annĂ©e. En vertu d'un accord signĂ© entre Madrid et Rabat, les Marocains interceptĂ©s sans papiers sont renvoyĂ©s sur-le-champ vers leur pays. Faute d'accords semblables, les expulsions vers la majoritĂ© des autres pays d'Afrique sont plus difficiles. "Une fois qu'ils quittent les centres d'accueil provisoire, ils restent sans papiers. Ils n'en sont pas toujours conscients", observe JosĂ© Villahoz, prĂ©sident de l'association Algeciras Acoge "accueil". INTERVIEW >> "Les causes qui poussent les migrants Ă  quitter l'Afrique s'aggravent" Les mineurs non accompagnĂ©s font exception. Ils bĂ©nĂ©ficient de la protection de l'Etat. C'est pourquoi les bateaux de clandestins marocains ne transportent quasiment que des adolescents. L'Espagne compte aujourd'hui 8 000 mineurs migrants non accompagnĂ©s, dont 70 % de Marocains. Il y a quelques jours, Susana Diaz, la prĂ©sidente de l'Andalousie, communautĂ© autonome qui en hĂ©berge le tiers, s'est plainte du manque de solidaritĂ© des autres rĂ©gions du pays. La voie Ă©troite de Pedro SanchezA Madrid, depuis le dĂ©but de l'Ă©tĂ©, le gouvernement du socialiste Pedro Sanchez tente de gĂ©rer la crise. Le jeune dirigeant espagnol est arrivĂ© au pouvoir par surprise, le 1er juin, Ă  l'issue d'une motion de censure dĂ©posĂ©e contre le gouvernement du Parti populaire de Mariano Rajoy, aprĂšs un mĂ©ga-procĂšs pour corruption. "Cela explique son imprĂ©paration. D'autant que l'immigration ne figurait pas parmi les prioritĂ© de son prĂ©dĂ©cesseur", souligne Elena Sanchez Montijano, spĂ©cialiste des migrations au Centre des affaires internationales de Barcelone Cidob, un institut d'analyse. Le centre Tartessos de l'association Cardijn Ă  Cadix offre repos et conseils aux nouveaux arrivĂ©s. Une majoritĂ© d'entre eux sont des Höhr Zamora pour L'ExpressMoins de deux semaines aprĂšs sa prise de fonction, le chef du gouvernement a mĂ©diatisĂ© l'accueil Ă  Valence de 630 passagers secourus par l'Aquarius au large de la Libye, aprĂšs le refus de plusieurs autres ports europĂ©ens, pourtant plus proches. Puis, dĂ©but aoĂ»t, Sanchez a donnĂ© son feu vert aux 87 migrants de l'Open Arms, Ă  AlgĂ©siras, un port loin d'ĂȘtre le mieux placĂ© pour ce navire Ă©galement en provenance de Libye, ce qui a surpris les ONG comme les Ă©lus locaux. Ensuite, tandis que l'Aquarius Ă©tait une nouvelle fois Ă  la recherche d'un port oĂč dĂ©poser 141 migrants supplĂ©mentaires, rescapĂ©s des eaux libyennes, Madrid a convenu avec l'UE d'accueillir 60 d'entre eux. "Pedro Sanchez a pris la question au sĂ©rieux, juge Elena Sanchez Montijano. En tĂ©moigne la crĂ©ation d'un 'commandement opĂ©rationnel unique' des forces de sĂ©curitĂ© espagnoles, et la rencontre avec Angela Merkel dans la rĂ©sidence officielle de Doñana, en Andalousie, en grande partie consacrĂ©e Ă  cette question." Au terme de cette rencontre, les 11 et 12 aoĂ»t, les deux dirigeants ont promis de peser sur Bruxelles en faveur d'une aide financiĂšre additionnelle Ă  Rabat pour contrĂŽler ses frontiĂšres. CoĂŻncidence ? La semaine passĂ©e, les ONG ont dĂ©noncĂ© des rafles de migrants subsahariens aux abords de Tanger, y compris parmi ceux rĂ©gularisĂ©s ces derniĂšres annĂ©es dans le royaume. Plusieurs centaines d'entre eux auraient Ă©tĂ© dĂ©barquĂ©s en bus Ă  Tiznit, Ă  800 kilomĂštres plus au sud. Migrants invisiblesDans les rues d'AlgĂ©siras, de Tarifa ou de Cadix, malgrĂ© la poursuite des arrivĂ©es, les migrants sont Ă  peine visibles. La plupart des candidats Ă  l'exil ne restent pas en Andalousie, oĂč le taux de chĂŽmage, Ă  23 %, accuse 8 points de plus que la moyenne nationale. DĂšs qu'ils le peuvent, ils se dirigent vers le nord et gagnent les grandes villes espagnoles ou d'autres pays europĂ©ens. A la diffĂ©rence des locaux amĂ©nagĂ©s par les associations, les centres d'accueil de l'Etat et de la Croix-Rouge sont fermĂ©s aux mĂ©dias. Le port de San Roque, oĂč a accostĂ© l'Open Arms, le 9 aoĂ»t, aussi. Une "opacitĂ©" qui agace journalistes et Ă©lus locaux. Le maire d'AlgĂ©siras, JosĂ© Ignacio Landaluce PP, reproche Ă  Madrid de ne pas l'avoir consultĂ© lors de l'accueil de l'Open Arms en Andalousie. Il dĂ©nonce aussi la focalisation des mĂ©dias sur les navires des ONG, tandis que ceux des secours maritimes sont passĂ©s sous silence "A AlgĂ©siras, proteste-t-il, on a reçu 30 Aquarius en un mois." L'Espagne compte aujourd'hui 8 000 mineurs migrants non accompagnĂ©s, dont 70 % de Marocains. Gonzalo Höhr Zamora pour L'ExpressA quelques mois d'Ă©lections rĂ©gionales et europĂ©ennes, Pedro Sanchez, Ă  la tĂȘte d'un gouvernement minoritaire, sait que sa marge de manoeuvre est Ă©troite. Les ONG lui reprochent de ne pas en faire assez. Mais la vague migratoire estivale a créé une surenchĂšre Ă  droite. Il y a une dizaine de jours, le groupuscule d'extrĂȘme droite Vox a organisĂ© un rassemblement au coeur d'AlgĂ©siras, attirant quelque 200 personnes, afin de dĂ©noncer l'"invasion programmĂ©e" du pays. Le successeur de Mariano Rajoy Ă  la tĂȘte du Parti populaire, Pablo Casado, au profil plus droitier que l'ancien dirigeant, se veut intransigeant "L'Espagne ne peut absorber les millions d'Africains qui veulent venir en Europe", a-t-il proclamĂ©, le 29 juillet, lors d'un dĂ©bat Ă  Avila. De mĂȘme, Albert Rivera, patron du parti libĂ©ral Ciudadanos, critique l'"angĂ©lisme" du chef du gouvernement et dĂ©nonce, Ă  l'instar des dirigeants de Vox et du PP, l'"appel d'air" provoquĂ© par l'accueil de l'Aquarius. Les humanitaires, eux, fustigent cette instrumentalisation. "Les politiques parlent d'arrivĂ©es massives et d'invasion, pointe Gabriel Delgado. Utiliser la peur pour en tirer des bĂ©nĂ©fices Ă©lectoraux, c'est immoral." L'Espagne risque-t-elle de subir le syndrome de l'Italie ? En 2015, la gĂ©nĂ©rositĂ© des habitants de l'Ăźle de Lampedusa avait Ă©tĂ© unanimement saluĂ©e. La maire de la principale ville, Giusi Nicolini, avait mĂȘme Ă©tĂ© reçue par le pape François. Las ! Trois ans plus tard, elle a Ă©tĂ© platement battue aux Ă©lections, et l'opinion semble plĂ©bisciter le discours hostile aux migrants du ministre de l'IntĂ©rieur, Matteo Salvini. Pour le moment, les deux situations ne sont pas comparables au total, depuis janvier, quelque 31 000 personnes sont arrivĂ©es par la mer ainsi que par voie terrestre dans les enclaves marocaines de Ceuta et Melilla. L'Italie, elle, avait reçu 120 000 migrants en 2017. Et une moyenne de 168 000, chacune des trois annĂ©es prĂ©cĂ©dentes. Maria Luisa Serrano, de Tarifeños solidarios", collecte et distribue vĂȘtements et produits de premiĂšre nĂ©cessitĂ© aux migrants dans des locaux prĂȘtĂ©s par la mairie de Höhr Zamora pour L'Express La nuit tombe sur Tarifa. Tandis que les amateurs de kitesurf remplissent les terrasses de la vieille ville, Maria Luisa Serrano et Laetitia Goffard, de l'ONG Tarifeños solidarios, prĂ©parent des colis de vĂȘtements dans des locaux prĂȘtĂ©s Ă  leur association par la mairie. Entre deux rafales de vent, on perçoit le bruit d'un hĂ©licoptĂšre. "Quand on les entend, on sait qu'un sauvetage est en cours, explique Maria Luisa. Nous avons eu la chance de naĂźtre sur cette rive de la MĂ©diterranĂ©e plutĂŽt qu'en face, ajoute-t-elle, pointant du menton la cĂŽte marocaine, Ă  14 kilomĂštres de lĂ . Quand je vois ces adolescents dĂ©semparĂ©s, je me dis que ça pourrait ĂȘtre mon fils ou mon neveu. S'ils en avaient besoin, je serais heureuse que quelqu'un, quelque part, leur vienne aussi en aide." De notre envoyĂ©e spĂ©ciale, Catherine GouĂ«set. Photos Gonzalo Höhr Zamora pour L'Express Les plus lus OpinionsLa chronique de Vincent PonsVincent Pons, avec Boris VallĂ©eLa chronique de Marion Van RenterghemPar Marion Van RenterghemLa chronique de Sylvain FortPar Sylvain FortLa chronique du Pr Gilles PialouxPar le Pr Gilles Pialoux Leport de Ceuta Ceuta bĂ©nĂ©ficie d’un emplacement gĂ©ographique privilĂ©giĂ© dans le dĂ©troit de Gibraltar, prĂ©sente des avantages fiscaux et son port dispose d’une expĂ©rience consolidĂ©e dans le trafic passagers, les marchandises et les fournitures aux navires. Le port de Ceuta contribue de maniĂšre significative Ă  l’économie locale, mais complĂšte Ă©galement l’offre touristique Plus de navires ont traversĂ© le dĂ©troit de Gibraltar en 2014. Soit plus de 250 chaque jour ou plus de 10 Ă  chaque heure. La zone du dĂ©troit de Gibraltar devient incontournable en termes de commerce et d’échanges internationaux. Dans une rĂ©gion sensible. Le port de Tanger-Med et la Tanger Free Zone modifient le visage de la rĂ©gion de Tanger. A l’est du dĂ©troit de Gibraltar, Ă  Sebta, territoire occupĂ© par l’Espagne, Madrid permet quotidiennement Ă  plus de porteurs marocains de gagner leur vie en exfiltrant» des produits de consommation vers Fnideq, TĂ©touan et la plate-forme» de Ksar el KĂ©bir Ă  150 km plus au sud. Juste au nord, AlgĂ©siras est le premier port espagnol et premier port de la MĂ©diterranĂ©e. C’est lĂ  que se trouve aussi la plus importante raffinerie espagnole de produits pĂ©troliers. Juste Ă  cĂŽtĂ© se trouve une base de sous-marins nuclĂ©aires. navires de marchandises par an, traversĂ©es du dĂ©troit et une concentration de marines militaires Ainsi du conflit Ă©ternel» entre l’Espagne et Gibraltar. Madrid ne reconnaĂźt pas la souverainetĂ© britannique sur le Rocher, comme Rabat pour Sebta et MĂ©lillia. Mais Gibraltar, grĂące au 
 trafic de cigarettes et d’alcools, vit et fait vivre les habitants de La LinĂ©a, de San Roque et une partie de ceux d’AlgĂ©siras. A l’abri des bureaucrates de Londres et de Bruxelles discrets sur le sujet, Gibraltar est une petite place financiĂšre oĂč les gestionnaires de fonds n’ont pas de plaques sur les entrĂ©es d’immeubles. Mais cela n’empĂȘche pas aujourd’hui, que prĂšs de 20% des voitures vendues au Royaume-Uni d’ĂȘtre assurĂ©es 
 Ă  Gibraltar. Au-delĂ  des chiffres et des curiositĂ©s rĂ©gionales, Rabat, Madrid et Londres –mais aussi Washington- se soucient de plus en plus des consĂ©quences de la croissance du trafic dans le DĂ©troit et son impact sur les politiques sĂ©curitaires. Les guerres du Moyen-Orient et les menaces terroristes accentuent la tendance. Avec plus de bateaux par an, traversĂ©es de car-ferries et de fast-ferries entre Tanger, Tarifa, Tanger-Med, Sebta, AlgĂ©siras et Gibraltar chaque annĂ©e et des gazoducs qui relient le Maghreb Ă  l’Europe du sud, enjeux Ă©conomiques et sĂ©curitaires sont Ă©troitement liĂ©s. Depuis la fin des annĂ©es 1960, les AmĂ©ricains disposent d’une base aĂ©ronavale Ă  Rota prĂšs de Cadix. L’ Navy ne peut rien faire en MĂ©diterranĂ©e ni au Moyen-Orient sans transiter par la rĂ©gion. Si les affaires et les flux financiers sont importants Ă  Gibraltar, c’est parce que les Anglais comprennent l’importance de leur prĂ©sence sur le Rocher. En termes de colonies, de commerce et de gĂ©opolitique, les Anglais ne sont pas des amateurs. C’est pourquoi Gibraltar abrite aussi des sous-marins nuclĂ©aires, malgrĂ© l’opposition de Madrid. L’Espagne est la seule puissance prĂ©sente des deux cĂŽtĂ©s du dĂ©troit de Gibraltar. Sur la pĂ©ninsule Ă  Tarifa et Ă  Malaga, mais aussi Ă  Sebta et Ă  MĂ©lillia. C’est ce qui rend et qui continuera de rendre les Ă©changes maroco-espagnols sur la dĂ©colonisation toujours compliquĂ©s avec l’Espagne mais Ă©galement avec l’OTAN. Il y a moins de six mois, en novembre 2014, le think tank madrilĂšne Instituto Elcano publiait un rapport remarquĂ© intitulĂ© L’Espagne regarde vers le Sud de la MĂ©diterranĂ©e au Sahel» dans lequel une attention particuliĂšre Ă©tait portĂ©e Ă  l’importance gĂ©oĂ©conomique grandissante» de la rive sud. Une place importante y Ă©tait rĂ©servĂ©e aux thĂšmes de sĂ©curitĂ© et de dĂ©fense, insĂ©parables de la prospĂ©ritĂ© Ă©conomique du Vieux continent. Un conseil de la sĂ©curitĂ© maritime Ă  Madrid Depuis l’an passĂ©, Madrid dispose mĂȘme d’un Conseil de la sĂ©curitĂ© maritime qui se rĂ©unit une fois par mois et dont la prĂ©sidence tourne entre les ministĂšres de la DĂ©fense, des Affaires Ă©trangĂšres et de l’IntĂ©rieur. Le Maroc accĂ©lĂšre le pas. Le dĂ©troit de Gibraltar cĂŽtĂ© sud comprend dĂ©sormais deux stations de radars Ă  Tanger et du cĂŽtĂ© de Ksar Sghir. Un port militaire doit accueillir ses premiers marins marocains dĂšs cet Ă©tĂ© 2015. Celui-ci est situĂ© Ă  quelques miles de Tanger-Med, face aux cĂŽtes de Tarifa et de la baie d’AlgĂ©siras. La prise de conscience de l’importance commerciale et sĂ©curitaire de la zone nord du Maroc mĂ©diterranĂ©en progresse. Autrement formulĂ©e, elle a fait des pas de gĂ©ant en 10 ans. Outre le lancement dĂ©terminĂ© des infrastructures de Tanger-Med en 2006-2007, l’étude d’un projet similaire Ă  Nador, la construction du port militaire de Ksar Sghir et le souci de dĂ©velopper l’arriĂšre-pays de Fahs-Anjra relĂšvent de la mĂȘme logique. Tanger-Med rĂ©flĂ©chit au sens qu’il faut donner Ă  l’amplitude que prennent les aspects Ă©conomiques et sĂ©curitaires dans la rĂ©gion», indique une source de TMSA Ă  MĂ©dias 24. Le besoin d’une rĂ©flexion approfondie et professionnelle en termes de potentialitĂ©s, de risques, de forces et de faiblesses se pose. Pour l’instant, si l’investissement sur Tanger-Med est l’un des plus importants effectuĂ© au Maroc au cours de ces 10 derniĂšres annĂ©es, la province de Fahs-Anjra demeure paradoxalement l’une des rĂ©gions des plus pauvres et des moins alphabĂ©tisĂ©es du pays. Enjeux marocains Les enjeux sont Ă©normes pour le Maroc. C’est dans cette zone que se recrute aujourd’hui une grande partie des jihadistes marocains et espagnols qui donnent tant de soucis aux services de sĂ©curitĂ© des deux pays. Depuis 40 ans ici, la sagesse» populaire veut que les jeunes de la rĂ©gion aient le choix entre le trafic de drogue, la contrebande ou l’émigration pour s’en sortir». Depuis les guerres d’Afghanistan et d’Irak et Daech, s’est rajoutĂ©e l’option terrorisme aux trois premiĂšres. Tristes choix. C’est d’ici que s’exporte le haschich du Rif dont les revenus, des centaines de millions d’euros chaque annĂ©e, servent Ă  distordre une saine compĂ©tition politique» Ă  Tanger, TĂ©touan, Nador ou Al Hoceima notamment, mais pas seulement. L’argent de la drogue joue un rĂŽle d’amortisseur social important en Ă©tant blanchi dans la contrebande avec Sebta et MĂ©lillia. Les produits de contrebande sont stockĂ©s Ă  Fnideq et TĂ©touan avant d’ĂȘtre redistribuĂ©s sur le reste du pays. Le circuit de blanchiment est limpide. C’est d’ici Ă©galement que partent les pateras de jeunes Subsahariens originaires de pays avec lesquels le Maroc, les entreprises marocaines et la sociĂ©tĂ© civile marocaine souhaitent dĂ©velopper les Ă©changes. Enfin, plus de trois millions de Marocains vivent au nord du dĂ©troit de Gibraltar. Dont prĂšs de en Espagne. Un autre million en France et un autre demi-million en Italie. La ville de Sebta, moins de habitants, est peuplĂ©e Ă  moitiĂ© de musulmanĂšs comme aiment dire les rĂ©sidents espagnols de la ville pour dĂ©signer, sans distinction, les Espagnols d’origine marocaine ou les Marocains y rĂ©sidant lĂ©galement ou non. En rĂ©alitĂ©, la zone du dĂ©troit de Gibraltar, de Tanger Ă  Tarifa et de Sebta Ă  AlgĂ©siras, se trouve Ă  un moment historiquement porteur sur les plans Ă©conomiques et gĂ©ostratĂ©giques. Le Nord du Maroc et le sud de l’Espagne se dĂ©veloppent, les deux rĂ©gions faisant le lien entre deux continents, l’un riche, l’autre au potentiel reconnu. Le moment est Ă  saisir pour rĂ©duire l’économie de la drogue et favoriser l’entreprenariat, l’économie sociale et les initiatives privĂ©es. En 2015 comme en 2050, il y aura toujours 14 km qui sĂ©parent Tarifa de Tanger-Med, et 44 km qui sĂ©parent le cap Spartel tangĂ©rois du cap Trafalgar prĂšs de Cadix. Sur le plan gĂ©ostratĂ©gique, l’importante commerciale et militaire croissante de la zone du dĂ©troit ne peut que servir son dĂ©veloppement. C’est par lĂ  que passent 50% du pĂ©trole et 40% du gaz consommĂ©s en Europe. Plus de 75% des importations europĂ©ennes. Les ports de Tanger-Med et d’AlgĂ©siras sont autant marocains, qu’espagnols, africains ou europĂ©ens. Pour les Ă©conomies marocaine et africaine, Tanger-Med joue un rĂŽle chaque annĂ©e plus important. C’est de lĂ  que s’exportent les voitures et les piĂšces dĂ©tachĂ©es de Renault et par lĂ  que rentrent les intrants des industries textiles et Ă©lectroniques. Plus de camions passent par AlgĂ©siras chaque annĂ©e, du cĂŽtĂ© de Tanger-Med en 2014. De Tanger-Med, Renault a expĂ©diĂ© plus de vĂ©hicules produits en 2014 Ă  Melloussa vers ses concessionnaires d’Europe et du Moyen-Orient. La cohĂ©rence du dĂ©veloppement rĂ©gional prend forme. En 2014, Tanger-Med a traitĂ© un peu plus de 3 millions de conteneurs, AlgĂ©siras 4,5 millions. Le port marocain est considĂ©rĂ© comme l’une des infrastructures portuaires les plus connectĂ©es au monde, 16Ăšme sur 100. AlgĂ©siras est le premier port espagnol et mĂ©diterranĂ©en pour les conteneurs. Aujourd’hui, le trafic commercial Ă  travers le dĂ©troit de Gibraltar est supĂ©rieur Ă  celui du canal de Suez, d’Ormuz face aux cĂŽtes iraniennes ou de Malacca, au sud de la Malaisie. Gibraltar est le deuxiĂšme point de passage au monde aprĂšs le canal franco-britannique de la Manche. Le doublement en cours du canal de Suez Ă©gyptien doit enfin accĂ©lĂ©rer l’importance Ă©conomique de Tanger-Med et d’AlgĂ©siras. A la fin 2016, la mise en service du terminal Tanger-Med 2 doit porter la capacitĂ© du port marocain Ă  8,5 millions de conteneurs.
TangerMed est un hub logistique rĂ©gional situĂ© dans le dĂ©troit de Gibraltar, au Maroc, Ă  15 km de l’Europe et en connexion avec 186 ports Ă  travers le Monde. Il est composĂ© du « Port 1 » et du « Port 2 », ce dernier Ă©tant en cours d’extension. Tanger Med 1 comprend: Deux Terminaux, TC1 et TC2. Une surface totale de 80 hectares.
La reprise des relations entre l’Espagne et le Maroc, consacrĂ©e par la visite de Pedro Sanchez Ă  Rabat en avril, pourrait relancer le projet de construction d’un tunnel ferroviaire dans le dĂ©troit de Gibraltar, sur lequel travaillent les deux pays depuis des normalisation des relations entre les deux pays pourrait permettre Ă  ce projet qui date des annĂ©es 70 de prendre corps et d’offrir une liaison fixe par le dĂ©troit de Gibraltar ». Le coĂ»t important du projet avait Ă©tĂ© un obstacle Ă  sa rĂ©alisation, rappelle Ă La Razon, Jawad Kerdoudi, prĂ©sident de l’Institut marocain des relations internationales, soulignant que la Banque mondiale, la Banque europĂ©enne d’investissement, des fonds arabes ou le Fonds africain de dĂ©veloppement Ă©taient prĂȘts Ă  soutenir ce viabilitĂ© du projet pourrait aussi favoriser l’utilisation du tunnel comme gazoduc entre le Maroc et l’Espagne, afin de permettre le transport du gaz dans les deux sens », ajoute l’expert qui insiste sur le fait que la zone de rĂ©alisation du projet dans le dĂ©troit de Gibraltar est particuliĂšre en raison de sa proximitĂ© avec trois grands ports AlgĂ©siras, Tanger et Tanger Med et deux ports de taille moyenne Cadix et Ceuta.Une chose est sĂ»re, le projet reste d’actualitĂ©, d’autant que les deux pays ont exprimĂ© leur volontĂ© de travailler ensemble pour son dĂ©veloppement en mettant sur pied un comitĂ© mixte hispano-marocain et deux sociĂ©tĂ©s d’études la SociĂ©tĂ© espagnole pour les communications fixes Ă  travers le dĂ©troit de Gibraltar SECEGSA en Espagne, et la SociĂ©tĂ© nationale d’études du DĂ©troit de Gibraltar SNED au Maroc. Le ComitĂ© mixte, composĂ© de dix membres 5 espagnols et 5 marocains, se rĂ©unit au moins une fois par semestre, en Espagne ou au niveau transcontinental, le tunnel aurait un impact considĂ©rable sur les relations commerciales entre l’Europe et l’Afrique, favorisant un meilleur trafic de marchandises, une plus grande productivitĂ© des entreprises et la dĂ©localisation et la crĂ©ation d’entreprises. Le tunnel pourrait voir le jour en 2030-2040. Il s’étendra sur 42 km, dont 27,7 en sous-marin et 11 en souterrain 38,67 km au total, entre la pointe de Paloma Ă  Tarifa, et la pointe de Malabata, dans la baie de Tanger, avec une profondeur maximale de 300
I6EAZ.
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